Coup de ... gueule, retenu en janvier par une forme de décence par rapport au ton habituel de ce blog, et un emploi du temps intense, janvier étant classiquement un mois surchargé, au cours duquel au surplus des activités opérationnelles d'Intelfi, viennent s'ajouter la clôture de l'exercice précédent, l'ouverture administrative du suivant ainsi que la fin du déménagement du cabinet, enfin achevé, un prochain billet étant intégralement consacré à cet évènement majeur dans la vie de l'entreprise, au delà de ses présentations institutionnelles qui laissent, et c'est heureux, peu de place pour ce type d'exposé.
Mais c'est tout de suite puisque cela s'est passé en janvier;
Encore un bel exemple de confiscation d'un thème économique sérieux, voire vital pour l'économie française et sa place dans l'Europe et le reste du monde : la baisse des impôts en 2015 a occupé une petite semaine, coincée entre "The affair" et le "Pacte de compétitivité". Plus aucune hiérarchie des informations, entre le "people", le politique et l'économique, et une obligation ressentie ou nécessaire de renouveler à marche forcée la course des "news" quelle que soit leur véracité, leur intérêt pour les citoyens, la cohérence des politiques, indispensable à leur crédibilité interne (à l'égard des électeurs et de leur abstention grandissante et/ou de leurs votes dits protestataires ou plus simplement dangereux) et externe (des entreprises désireuses de s'installer à l'étranger et pourquoi pas en France, des agences de notation, des instances économiques, politiques et sociales européennes et des comparaisons des performances économiques des états à l'échelle mondiale.
Tout ceci pour souligner que la rigueur budgétaire à laquelle ce gouvernement a contribué jusqu'à présent de manière sensible, malgré des "trous dans l'gruyère", laisse, "side effect" ou stratégie concertée, polluer la visibilité de son action économique par tout, rien et ... n'importe quoi ! C'est d'autant regrettable que le "french bashing" dont on se plaint ces dernières semaines, pas entièrement à tort, résulte plus d'un problème de présentation que de fond, a fortiori si l'inflexion de la politique économique annoncée 18 mois après cette nouvelle mandature présidentielle de 2012, réserverait si elle allait à son terme, de bons résultats, sous réserve que la conjoncture le permette.
Pour être sur de ne pas se tromper, voici 5 orientations qui pourraient constituer la "feuille de route" ou plutôt de MPO (Management Par Objectifs) de Bercy, tous étages, ministères, secrétariats d'état, Départements, services, unités, et pour finir comme dans Asterix, phalanges et manipules.
1/ Ne pas se méprendre sur l'incidence des décisions franco-françaises sur les résultats de l'économie du pays. Cette dernière est comme chacun sait ultra symbiotique avec les économies européennes, occidentales et asiatiques, dans le sens macro-micro. Poliment dit, dans le meilleur des cas, la France suit, engrange ou subit, ses dirigeants ne donnent pas la mesure.
Aussi, on peut s'engager sur une baisse du chômage à la saint glin-glin, comme le Président Hollande le fit fin 2012, mais lorsqu'on sait que le seuil de 3% de croissance économique en France correspond à la "nouvelle frontière" à atteindre pour créer des emplois en nombre significatif, et qu'aucune prévision européenne et OCDE ne montrait ce seuil il y a un peu plus d'un an, c'était un coup de dés, de roulette russe ou pire, de roulette ... belge.
De plus, le président anima un cours avec son actuel ministre de l'économie dans cette matière à Sciences-Po il y a une bonne vingtaine d'années. Il y laissa un excellent souvenir, de l'avis de certains de ses anciens étudiants, de forte compétence et ... d'humour. La seconde caractéristisque semble avoir traversé le temps sans trop de dommages, quand à la première, M. le Président, je vous laisse juge... et n'ajoute pas pour donner une connotation juridico-paillarde bien inconvenante dans l'actualité de ces derniers jours, "coincé qu'il est, le président" entre "the Affair" et la "Manif" de dimanche dernier, que comme le Code Civil le stipule, "le juge doit être saisi ... par les parties".
2/ Eviter le "Wishfull thinking". Le politique est pragmatique, c'est même sa principale seule caractéristique constante. Croire excessivement ce que l'on dit, durablement, alors que les indicateurs instantanés et projectifs démontrent sans ambiguité l'inverse, confine à l'enfermement. Est-ce un symptôme de la fameuse solitude du pouvoir ? A voir. En tout cas, ne pas prendre les citoyens, en particuliers ceux munis d'un bulletin de vote, pour des veaux amnésiques devrait mécaniquement augmenter leur participation aux élections et le centrage de leurs votes. Tout le monde peut comprendre les notions de base de la macro-économie. On manque d'ailleurs au dela des filières d'élite telles que les prépas ou les filières spécialisées telles que les universités d'un enseignement minimal en Sciences Economiques. Le "Google Syndrom" médical, si pénible aux médecins, gagnerait à être étendu à l'économie.
3/ Promettre des baisses d'impôts, oui mais :
Et on parle de plus de l'IRPP. Impôt à l'assiette creuse retournée (moins de 50% des foyers fiscaux y sont assujettis), l'impôt, qu'on parle de hausse ou de baisse, doit être pris en compte globalement, en intégrant ses effets d'élasticité à la hausse ou à la baisse, le report des gains d'opportunité en cas de baisse sur l'épargne ou la consommation, et dans ce dernier cas, conso. domestique ou de biens importés, ce qui est en moyenne le cas de 70 à 75% de l'euro marginal remis à la disposition du consommateur dans l'hypothèse d'une baisse de l'impôt.
4/ Cohérence
L'idée d'une forte hausse des impôts en 2012 et 2013 est cristalisée, et malgré des chiffres inégaux, les citoyens contribuables au titre d'un ou plusieurs impôts et charges en ont le sentiment. Aussi, promettre une baisse des impôts l'année prochaine s'apparente au celèbre "demain on rase gratis" mais ce sera finalement "parès demain, le rasage sera payant". Ici encore, qui parmi les annonceurs et les destinataires de cette promesse y croit sérieusement ?
5/ Prendre en compte les effets induits tels que l'élasticité, les coûts d'opportunité, les effets d'éviction, les usages de remplacement des suppléments de revenus éventuels ...
Ainsi, on évitera de se prononcer sur la justesse et la justice de la déduction fiscale (IRPP) pour "emplois familiaux" et/ou "services rendus à domicile" pour des montants naguère bien plus élevés qu'aujourd'hui. Oui, c'est assez injuste de constater que les leçons de violon à domicile du petit-dernier, ou mes cours de javanais, bénéficient du même dispositif que l'aide-soignante à domicile ou la femme de ménage. Mais le changement du mode de cotisations (du forfait au réel) doit mécaniquement conduire à quantum d'heures travaillées identiques, à une augmentation des recettes sociales.
Seulement voilà, le gouvernement n'a pas plus envie de détruire ces empois souvent faiblelement qualifiés que le bénéficiaire de ces services de s'en passer en partie afin de limiter sa dépense au niveau où elle se trouvait lorsqu'il cotisait au forfait plutôt qu'au réel. Et la solution vous me direz, elle est simple, et à la fois désolante, puiqu'elle se traduit par une constance ou une baisse des recettes sociales liée à l'activité baissière de ces emplois, directement liée à cette décision de modification de l'assiette des cotisations.
Et on ne peut croire un instant que le principe de cet effet d'éviction et son évaluation n'ait été préalablement faits, malgré une absence visible de prise en compte. C'est du niveau 1ère année.
En clair, si une telle décision, édictée par une forme de logique, n'est pas envisagée dans ses conséquences de niveau supérieur à 1 (on augmente les cotisations donc ça va rapporter plus), on ne peut éviter de donner l'impression que la prise de décisions politiqueet économique est erratique, ce qui n'est jamais bon pour les recettes fiscales et/ou sociales, et plus largement, la crédibilité des politiques qui constitue l'un des plus importants fondements de la démocratie. Plus simplement, pourquoi se tirer une balle dans le pied en public ? C'est à voir.
Enfin, exception française sans conteste puisque le métier d'Intelfi consistant à accompagner les entreprises et leurs dirigeants et salariés à l'étranger, le suivi des évolutions poltiques, économiques et sociales fait pleinement partie du job. Or c'est une situation inédite à la France de fonctionner ainsi, et non spécifique au président actuel et à sa couleur politique, la mandature précédente ayant donné largement son lot de situations et décisions analogues.
Retour à un format d'article plus classique sur la mobilité internationale dès le prochain billet. Ce blog a désormais 8 ans et plusieurs dizaines de milliers de lecteurs annuels. On pense ouvrir les commmentaires bientôt, mais ce qui retient cette décision est la nécessité d'un modérateur et parfois avant d'un correcteur ...
Jacques-Olivier Meyer - DG INTELFI - +33(0)1.47.56.11.81 • jomeyer(at)intelfi.com