De quoi s'agit-il ? un truc très simple, le choc consistant, après des années vécues sur un marché de l'emploi contingenté, risqué, si "protecteur" qu'il inhibe même les meilleurs face au changement, à se retrouver expatrié sur un marché d'emploi qui vous sollicite pour des progressions de carrière et de rémunération plus que jamais inconnues en Europe et tout particulièrement en France.
Quels sont les symptômes, les risques pour l'entreprise et le salarié selon son statut, comment s'y prendre pour en retirer le meilleur :
1 - On pose l'hypothèse que vous avez conclu avec vos collaborateurs internationaux, quel que soit leur statut, un contrat (d'expatriation, local), un avenant (détachement) et que les questions sur le statut, le contrat de travail, la protection sociale et la fiscalité ont été réglées au bénéfice de tous au moment du départ à l'étranger.
2 - Cet accord comporte encore fréquemment une clause de non-concurrence, d'exclusivité, voire de "pénalisation économique" quant aux aides éventuellement accordées à l'installation et au cours des premiers semestres à l'étranger dans l'hypothèse d'une démission ou d'un licenciement pour faute grave ou lourde.
3 - Ca se complique à la découverte d'un marché d'emploi local beaucoup plus vivace que le marché ... français dont la perception globale pour le Nième mois, puis trimestre, puis ... est celle d'une détérioration de la situation de l'emploi, symbolisée par l'augmentation des "demandeurs d'emploi de catégorie A".
Or le passage d'un marché chroniquement malade (France) à un marché structurellement excédentaire exerce un attrait que la plupart des expatriés et leurs employeurs locaux ou français (détachement) n'anticipent toujours pas, désaccoutumés qu'ils sont d'un tel fonctionnement.
Il en résulte des comportement aberrants parce que préjudiciables aux deux parties :
4 - Du côté des entreprises, c'est le volet "répressif", clause de non-concurrence et/ou clause dite de pénalisation économique qui est censé assurer l'employeur de la fidélité du salarié
5 - Du côté du salarié, c'est nouveau et tenant parfois quelques semaines après son arrivée à ... Singapour de se voir proposer un changement d'entreprise et de fonctions assortis d'un "Welcome Bonus" et/ou d'une augmentation de salaire de l'ordre de 20%.
Et ce volet répressif quasi-standard de ne pas fonctionner de manière satisfaisante, ni de manière dissuasive, ni en cas d'application dans des juridictions dans lesquelles les coûts, habitudes et processus d'intervention contentieux sont élevés et à apprendre, et la culture fréquemment bien plus libérale au nom de la liberté d'emploi (notion qui progresse également en France dans le contexte actuel, a fortiori lorsque des "clauses dissuasives de mobilité" sont rédigées de manière trop pingre).
Mais le salarié, qui l'oublie parfois, tout à son bonheur de susciter un pareil désir, n'a in fine aucun intérêt à multiplier les "sauts de puce" d'une entreprise à une autre. La négociation d'un poste au retour en France nécessitera de se situer dans le "marché" français, et non pas 50% plus haut. La plupart des salariés n'éprouvent aucun problème à "oublier" une partie de leur sursalaire local, certes la mort dans l'âme, en revanche, il devient très pénible de vivre sans. Ce qui était un facteur de crédibilité notamment dans le sud-est asiatique devient un handicap compétitif de retour en France.
Et du côté entreprise française ? Pas de "One best way",la DRH, justement embolisée par la part française de ses fonctions, n'aura pas nécessairement pris la mesure du danger de cette mobilité de chasseur de primes (pas uniquement) d'autant qu'il est d'une nature et d'un degré différents selon le pays de destination.
Il est donc nécessaire, possible et souhaitable de retenir les expatriés hauts-potentiels ou non, les détachés, et même certains anciens salariés localisés à la faveur de leur mobilité par des dispositions beaucoup plus managériales (il en existe et leur mise en oeuvre valorise tant l'entreprise que son salarié) et non plus exclusivement légales et/ou réglementaires, dont l'effet résiste à tout sauf ... à la tentation.
Et pourquoi l'absence d'obligation de réintégration au terme de la mobilité, propre aux expatriés au sens du droit du travail, empêcherait-elle de profiter des compétences de salariés localisés mais dont les objectifs personnels et professionnels peuvent rejoindre ceux de leur ex-employeur français ? D'expérience, on répondra qu'il convient déjà de se poser la question, qui est "oubliée" comme le salarié qui, localisé, ne figure plus à l'effectif et n'existe plus administrativement. C'est dommage.
C'est aussi une manière de réussir un "retour d'expatriation", sujet qui mérite d'être traité autrement que par les angles habituels, à lire dans un prochain billet. Pour en savoir plus, contacter Jacques-Olivier Meyer, jomeyer(at)intelfi.com - +33(0)1.47.56.11.81 - consultez www.intelfi.com