A celles et ceux qui partiront s'installer et travailler "ailleurs" en 2012, quelques conseils échangés avec les clients en ce premier lundi de l'année :
S'expatrier est LE projet professionnel le plus personnel et intime, en ceci qu'il devrait intéresser (de fait plus ou moins) la famille de l'intéressé (la mobilité internationale est le "crash test du couple" aux dires d'un client rentré prématurément), la dynamique de carrière (comment "revendre" une expatriation réussie à un chasseur de tête ou un DRH parfois peu au fait du pays dans lequel vous aurez investi vos temps professionnels, personnels, familiaux, dont vous aurez appris la langue, aimé la culture... contrairement aux idées reçues, l'interculturel est aussi un défi au retour, au moment ou bien des expatriés s'y attendent le moins, puisqu'ils rentrent "chez eux", ce d'autant plus que l'expatriation a été lointaine et de longue durée,
Une fois la généralité néanmoins exacte consistant à soutenir que "le retour mérite d'être considéré comme une nouvelle expatriation", il est possible de formaliser les quelques comportements qui contribuent au succès/àl'échec d'une mobilité internationale, lors de la négociation du contrat de travail international. Chacun les classera suivant son échelle de valeur et par ordre de classement personnel, on peut citer :
1 - Dans la négociation de "départ en expatriation", connaître les conditions d'emploi et de rémunération d'un salarié local qui serait employé dans la même fonction. Information du marché caché, longue à déceler, se prêtant à un réglage fin. On parle de la rémunération brute totale et de ses composantes, salaire brut de base et rémunération variable en pourcentage du salaire de base et en durée (annuelle, trimestrielle, pluri-annuelle). On trouve rarement par soi-même rapidement les bons chiffres, ceux qui vous rendront crédible dans la négociation,
2 - Déterminer sa prime d'expatrié (pas au sens classique des expatriés d'avant les crises), mais au sens de "la prime de l'or". Actuellement, "l'or flambe" et une pièce d'or, un Napoléon, une pièce de 20 dollars, un lingot, une pièce de 20 francs Suisse valent bien plus que leur poids en or, et la prime (survaleur) du Napoléon est proportionnellement inférieure à celle du 20 Dollar-or, parce que ce dernier est plus liquide internationalement qu'une valeur française ou européenne. C'est à peu près la même chose entre expatriés : votre prime est la survaleur que le futur employeur est prêt à payer à travers la rémunération au titre de la reconnaissance de vos compétences, par rapport à un salarié "localo-local". On ne traite pas ici du type de contrat de travail mais de la compétence et de la nationalité ou de la région d'origine du salarié,
3 - Toute erreur de plus ou moins 10% dans l'évaluation de votre "prime" d'expatrié risque fort de discréditer le candidat que vous êtes, l'excès et le défaut produisant à peu près les mêmes effets, qui consistent à rester à "la case départ",
4 - Bien différencier rémunération et éléments de compensation notamment dans le domaine social. Bien des français candidats à l'expatriation partent du principe qu'ils entendent maintenir (tous) leurs avantages sociaux à l'étranger, et que ceci est une "dead end" ou casus belli de la négociation de mobilité internationale. Or la "protection sociale à la française" coûte fort cher aux employeurs et aux salariés et son caractère obligatoire ne doit pas tromper sur son coût, ce qui paradoxalement, libère du budget pour négocier à l'étranger. Encore faut-il avoir fait ou fait faire ses calculs avant d'aborder la négociation,
Reprenez pour voir votre bulletin de salaire de décembre dernier et additionnez les cotisations sociales patronales et salariés. Il y a de quoi "se payer" une protection sociale complète dans bien des pays, dans lesquels elle est optionnelle. On ne parle pas ici d'efficacité des cotisations, ce qui est un autre débat,
5 - L'entreprise locale ne doit pas considérer que son futur salarié peut devenir son "futur-ex salarié", au motif que ce dernier, par la maladresse/la persistance de ses demandes notamment en matière sociale, donne l'impression de comparer et permanence pays d'origine et pays d'expatriation, et de vouloir y importer ses régimes sociaux, ou du moins en faire prendre en charge le coût en local. Les mêmes budgets peuvent être évalués et négociés sans nécessairement spécifier le détail de l'indemnisation maladie ou chômage français, les jours de RTT, l'intéressement ou l'abondement, spécificités franco-françaises au mieux perçues à l'étranger comme des éléments exotiques,
6 - Comment il est recommandé de ne pas mélanger, au cours des négociations, les questions personnelles et familiales avec les problématiques professionnelles d'une expatriation, ou pourquoi "ce qui se passe à Vegas reste à Vegas". Pourtant, une mobilité internationale réussie exige une décision familiale, le choix des écoles et du lieu de résidence devant être collégiaux. Mais ils n'intéressent que peu un employeur, du moins dans le grand détail. Il en est de même pour la perte de l'emploi du conjoint démissionnaire, conséquence pourtant directe de la mobilité internationale. Dans le meilleur des cas, l'employeur local peut faire bénéficier le salarié de contacts et de ses réseaux, mais il n'a en la matière ni obligation de moyens, moins encore de résultat, aucune obligation de compensation financière pour la perte de l'emploi du conjoint, et toute demande dans ce sens ...
7 - C'en est à se demander s'il est encore intéressant de partir ? Mais oui, pour peu que la négociation soit agencée d'abord autour du job, du job et ... du job, les mesures d'accompagnement en faisant partie, dès lors que leur coût est évalué précisément, que chacun des détails parfois fort/trop personnels n'est pas mis en avant pour légitimer la requête auprès de l'employeur, dont on rappelle qu'il travaille à budget constant, avec dans ces temps de mondialisation, cette idée fixe visant à vous comparer en termes de coûts avec un salarié local, sauf à connaître précisément sa prime d'expatrié (cf 2 & 3), a fortiori si elle est élevée et qu'il est possible d'en défendre le principe et l'application au cours de la négociation.
En résumé, vous avez toutes vos chances si vous préparez votre négociation comme suit :
- le job, la fonction, la description, le rattachement, le réseau, les collaborateurs, les objectifs
- la rémunération, le salaire de base, le bonus, l'incentive, la part variable, les actions, les av. en nature
- le contrat : est-ce toujours aussi intéressant d'être un "vrai" expatrié ? réponse dans un prochain post
- les avantages sociaux
et le reste, c'est à dire tout ce qui m'importe vraiment ainsi qu'à mes proches, mais qui est susceptible d'intéresser modérément, peu ou pas du tout mon futur employeur à l'étranger. Pour ne pas se retrouver bloqué entre l'arbre et l'écorce, des proches qui en attendraient beaucoup (trop) et un employeur insuffisamment sensible à des demandes personnelles légitimes, la préparation de la négociation en amont marque la différence, par la sélection et l'agencement des demandes dans le contexte d'une mobilité internationale spécifique. Il n'y a pas de "one best way", chaque négociation est spécifique !
En savoir plus pour réussir sa négociation : Jacques-Olivier Meyer, DG INTELFI, +33.1.47.56.11.81, jomeyer(at)intelfi.com