Comment, les DRH exerçant en France seraient si différents de leurs homologues occidentaux ? Encore un coup de provoc. de ce blog pour se faire remarquer ? Et bien non; Qu'on trouve 2, 5,7 ou 12 raisons, le DRH à la française est différent. Voici pourquoi :
Alors c'est bien sur grossier et nécessite des explications détaillées, dont ce chapitre n'est qu'un aperçu. D'après les résultats de l'Etude Intelfi 2013 (échantillon SBF 120, 200 répondants retenus), les DRH (services et personnes les dirigeant) sont perçus par les salariés de leur entreprise comme principalement :
. vus le jour de l'arrivée dans l'entreprise et au moment du départ, parfois
. non opérationnels pour la gestion de carrières, les opérationnels étant les "vrais" décideurs et interlocuteurs auquels les demandes ont bien plus de chances d'être entendues
. verbatim : "on ne sait pas ce qu'ils font", "en quoi leurs activités consistent", "ils sont nombreux", "il cultivent un certain secret", "on les appelle la firme"
. "quand on demande un rendez-vous, on n'en sort pas avec l'esprit plus clair quant aux décisions prises qu'en entrant"
. "ils passent beaucoup de temps en comités, négociations, assurent la paix sociale, mais est-ce bien vraiment d'eux que ça dépend" ?
. "Ils croulent" sous le droit du travail
. ils ne décident rien, conseillent dans le meilleur des cas, tentent souvent d'influencer sans succès
. c'est l'homme/femme à tout faire de la direction générale ou du P-DG
Même en disposant d'un moral d'acier, tout ceci n'est pas si positif que cela...mais :
c'est à pondérer par la taille, l'activité et les responsabilités exercées par les répondants, ainsi que divers biais, cela dit, on a déjà fait mieux, indéniablement. Alors pourquoi tant d'incompréhension, sachant que les mêmes questions ont été posées à des salariés anciens expatriés et que les réponses ont été "pires", c'est d'ailleurs la raison pour laquelle on en parle dans ce blog.
Et bien il n'a pas fallu chercher très longtemps avec les DRH amis du cabinet (il y en a encore) et c'est d'ailleurs un métier que j'au fait avec grand plaisir à l'international entre ma sortie de l'école en 89 et 2004), soit suffisamment longtemps pour se faire une idée précise. Et bien de l'avis des DRH en poste, ils se sentent fréquemment tenus d'effectuer des missions qui sont loin de les passionner mais qui indéniablement appartiennent à leur domaine et sont, soit par leur nature, et/ou soit par leur volume, spécifiquement françaises.
1 - La conformité avant tout : le droit du travail français impose de très nombreuses obligations et leur non observation peut conduire à de très sérieux ennuis, de la simple remontrance administrative de la DDTEFP à la mise en cause de la responsabilité personnelle, a fortiori lorsque la DG a délégué au DRH ses pouvoirs. Le déli d'entrave n'est pas forcément très loin de la pratique quotidienne du DRH qui constitue alors un fusible idéal. Les DRH passeraient, comapartivement à leurs homologues étrangers, bien plus de temps à s'assurer de la conformité légale et réglementaire, temps qui s'impute sur le temps à consacrer à d'autres actions plus visibles.
2 - Focus sur la France : de ce qui précède, suit une focalisation sur la France. Pas de droit du travail ni de roit social européen, Comité de Groupe Européen mis à part. Qui s'intéresse comme en 1/ à la France dispose de bien moins de temps pour les autres pays dans lesquels l'entreprise est présente ou serait un jour présente. Les opérationnels, eux, ne loupent pas le coche du développement international.
3 - Formation initiale : la fonction RH est, de celle appartenant à la direction d'entreprise, celle dont les titulaires ont les niveaux de formation les plus hétérogènes, plus de 50% d'entre eux n'ayant pas reçu à l'origine, en termes de formation initiale, de formation en RH, ce qui est le taux le plus élevé dans cette catégorie/niveau de personnel, avec cependant un "cut" très net entre ancienne génération et nouvelle (cf mon post précédent sur le CELSA et ses concurrents)
4 - Pratique de l'international : pratique des langues dont l'anglais trop faible de l'avis même des intéressés, manque de suivi des affaires les plus opérationnelles et notamment du développement de l'entreprise, par une association trop ténue lors de projets M&A majeurs où ils se sentent "doublés" par des cabinets extérieurs, ce qui n'est pas faux.
5 - DRH un jour, DRH toujours : la France est le seul pays de l'OCDE où des carrières entières s'effectuent dans la fonction RH, ou il est possible de rentrer une fois ses études terminées et d'effectuer toute sa carrière jusqu'à la réception de la traditionnelle canne à pêche de pôt de départ pour les entreprises les plus franchouillardes et d'une tablette numérique pour les plus "modernes". Problématiques de formation permanente et continue, adaptation aux nouvelles générations X, Y et bientôt Z, e-learning et révolution annoncée de la formation placée sous la férule du DRH, le poste n'est pas de tout repos, mais pour autant pas nécessairement visible par les salariés. Cependant, les pays dans lesquels les DRH sont occasionnels pour 2/3 ans et retournent à l'opérationnel ensuite bénéficient d'un brassage des compétences inexistant en France, et qui nécessiterait si une volonté existait une génération pour être enfin efficaces.
6 - Collectifs : bien que cela ne se voie pas, les DRH français oeuvrent pour la collectivité, ce au détriment du suivi individuel des salariés et de leurs carrières, sauf à disposer d'équipes suffisamment stafées pour que cette compétence y soit présente. Iem pour la compétence Compensation & Benefits qui n'a jamais bien pris en France, contrairement au Royaume-Uni ou aux USA. Le poste est à mi-chemin entre la DRH et la Direction financière, or compter n'est pas la tasse de thé des DRH, du moins pas au niveau de précision des financiers, ce qui est dommage lorsque 70 à 80% de la V.A. sont absorbés par les coûts de personnel comme c'est le cas dans le secteur des services
7 - Accéder à l'autonomie sur ses données chiffrées RH : combien de Comités Exécutifs ont senti le tonnerre de l'orage lorsqu'une ligne coûts d'expatriation par ailleurs très chèrement alimentée a été remarquée par le DG et que le DRH a "sêché" sur la justification de ce montant, injustement cru comme allant directement dans le "net in the pocket" du salarié, alors qu'il s'agit le plus souvent de compensations pour coût de la vie, IR, écoles ... dont le coût est plus élevé à l'étranger qu'en France. Son collègue et néanmoins (ancien) ami s'est fait un plaisir d'expliquer ces facteurs de coûts, ce qui n'a pas manqué d'être noté comme une carence DRH, ces derniers devant désormais parfaitement maîtriser leurs chiffres.
And so on ... la suite au prochain numéro.
Pour en savoir plus sur le diagnostic et les remèdes, dont certains sont enseignés dès les premières années d'études sup, et pour former vos DRH à l'international, même si le constat n'est pas aussi caricatural que ce qui précède, contactez Jacques-Olivier Meyer, DG Intelfi - "jomeyer(at)intelfi.com", +33(0)1.47.56.11.81 et le site corporate du cabinet.